paysans bios indésirables

Les terres de la discorde, Sud Ouest, 10/10/07
David Briand
Marsac. Le maire de la commune veut creer une zone naturelle qui empecherait un paysan de developper sa ferme ecologique. Ce dernier lance un appel a soutien.
C'est un appel « d'urgence » lance sur le site internet a sensibilite ecologique, Passerelle-Eco. Richard Wallner, un jeune homme de 31 ans, qui a monte un concept de ferme ecologique a Marsac, demande le soutien des internautes face « aux agriculteurs du conseil municipal qui veulent m'expulser pour recuperer les terres et "chasser l'ecolo" ».
Il les invite a se manifester lors de l'enquete publique, debutant le 29 octobre, chargee d'avaliser le PLU (1) dont se dote la commune. Une carte communale qui classe en zone naturelle les 9 hectares de terrain achetes par Richard Wallner en 2005. Et qui l'empecheront de construire sa maison d'habitation et ses batiments agricoles, vitales pour assurer la perennite de sa ferme ecologique.
De quoi s'agit-il ? Richard Wallner, ingenieur electronique, s'installe sur la commune voila deux ans, en achetant des terres appartenant a un agriculteur bio. Le contact entre le maire, par ailleurs agriculteur qui produit cereales, vignes et eleve des cochons, et le paysan n'est pas des plus chaleureux.
« Ce n'est pas un paysan »
Richard Wallner lui presente son projet de permaculture, de ferme ecologique globale dans laquelle seront cultives cereales, fruits, legumes. Vendus localement et directement aux consommateurs. Bien loin des modes de culture traditionnellement utilises par les paysans, il ne laboure pas, n'emploie ni pesticide, ni engrais, ni herbicide.
« Je lui ai dit que c'etait un doux reveur, se rappelle Jean-Marie Acquier, le maire, avant de lacher : « pour moi, ce n'est pas un paysan. Imaginez si tout le monde faisait comme lui, comment nourrirait-on la planete ? »
Apres avoir plante haies, arbustes et arbres en septembre 2005, Richard Wallner vend des paniers de saison, « aujourd'hui une trentaine », depuis aout 2006.
« Mais avec le projet de classement en zone naturelle, le potentiel ne sera pas exploite, car je ne pourrai pas developper la ferme, ni souscrire d'emprunt aupres des banquiers, ni recruter un coexploitant ».
Second hiver en caravane
Richard Wallner a d'abord ete freine par le projet de la municipalite d'installer une station d'epuration juste a cote du Petit Colibri, le nom de sa ferme. « Une etude d'un cabinet nous a indique que c'etait l'emplacement adequat », assure le maire. « Tres bien, dit Richard Wallner, ca va creer une zone humide favorable a la biodiversite. »
Le hic pour lui, c'est que le maire a l'intention de classer les alentours en zone naturelle.
« On a deja beaucoup de terrains classes sur la commune, comme Natura 2000. Les agents de l'Etat m'ont sollicite pour classer davantage de terrains en zone naturelle. Et puis, une habitation ici, ce serait comme une verrue. Je n'ai pas envie de creer un precedent. Se pose le probleme des reseaux a financer. Et enfin il faut songer au ramassage scolaire avec le surcout si M. Wallner a des enfants », souligne l'elu.
Richard Wallner ne comprend pas. « La ferme participe a la qualite de vie dans une campagne preservee et vivante. Le maire peut de toute maniere refuser le permis sans le classement en zone naturelle. »
Si le PLU est adopte en l'etat, il envisage de l'attaquer devant le tribunal administratif pour abus d'autorite. En clair, ca veut dire que le classement en zone naturelle serait motive par l'objectif de lui nuire, en lui interdisant toute construction, meme des batiments agricoles.
Dans un esprit « constructif », il propose aussi une solution. « Pourquoi ne pas creer un pole de developpement durable en associant station d'epuration et ferme ? »
En attendant, Richard Wallner n'a pas depose de permis de construire. Il va passer son deuxieme hiver en caravane, sur ses terres. « Ca, c'est vrai que ce n'est pas chouette » reconnaît le maire.
(1) Plan local d'urbanisme
<http://www.sudouest.com/101007/reg_charente.asp?Article=101007aP966502.xml>